La culture du numérique en milieu agricole
Nous avons mené une petite enquête qualitative sur les usages du numérique dans les exploitations agricoles en août 2018 par approche directe auprès de 40 exploitations (moyennes et grandes) ciblées dans notre réseau. Cette enquête a suscité un vif intérêt auprès des interviewés, Ils ont joué le jeu et nous en voulons pour preuve la qualité et la richesse de leurs réponses. De ces échanges très vivants, passionnants et passionnés nous retenons la grande matûrité et le pragmatisme implacable dont ont fait preuve nos interlocuteurs et que nous avons voulu partager avec vous.
Un petit tour dans « L’Agrinumériculture »

Maturité
Les agriculteurs se rendent dans les mêmes salons, lisent les mêmes « influenceurs » et les mêmes revues spécialisées, s’informent auprès des mêmes conseillers et écoutent les mêmes informations sur les différents médias (Radio, TV et réseaux sociaux). Tous, expliquent de mieux en mieux l’intérêt des nouvelles solutions numériques pour l’agriculture. L’information circule très bien et les principaux intéressés sont de plus en plus informés et convaincus par les « premiers adopteurs » qu’ils côtoient. 86 % reconnaissent l’intérêt de faire rentrer plus de numérique dans leurs exploitations afin de répondre aux nouveaux enjeux économico-politico-environnementaux. Alors pourquoi n’assistons-nous pas à ce jour à un raz de marée en faveur de ces nouvelles offres ? Et bien les interviewés nous répondent du tac au tac « OK, mais pas n’importe quoi et à n’importe quel prix ». Les enjeux économiques sont tellement importants que la décision d’achat dépend plus que jamais d’un prix clair, compétitif pour une valeur d’usage, rapide, clairement identifiable et supérieure à l’investissement. Un nombre non négligeable d’agriculteurs nous a également fait part de leur souhait de plus de transparence quant à l’utilisation que font toutes ces nouvelles offres numériques de leurs données.
L’agriculture est par ailleurs probablement le secteur où l’enjeu du numérique est le plus important avec un potentiel de création de valeur immense pour la filière agricole, de l’amont à l’aval, jusqu’au consommateur final et par extension, pour l’ensemble de la société civile. Les agriculteurs en ont pleinement conscience. Ils veulent être acteurs de cette transformation, ce qui les pousse à considérer ces nouveaux outils comme un moyen puissant de définir par eux-mêmes de nouveaux modèles technique et d’affaires.
Ainsi 86 % s’intéressent à une ou plusieurs nouvelles offres et solutions numériques, 19 % déclarent le faire déjà, 64 % se disent prêt à y souscrire mais pas pour n’importe quoi et à n’importe quel prix. 75% sont équipés de smartphone (ce qui est supérieur au taux d’équipement moyen national) et l’utilisent au quotidien pour consulter des informations courantes (météo, cours, comptes bancaires, actualités, messagerie) et 39 % déclarent s’en servir pour enregistrer ou gérer directement les informations de leur exploitation.
« Les industriels et les éditeurs doivent se réinventer et venir nous parler. Ce n’est pas par hasard si les nouvelles offres numériques qui fonctionnent aujourd’hui sont celles qui sont proposées par des agriculteurs, des vétérinaires, des conseillers, issus du terrain et reconvertis dans la création de valeur numérique pour leur filière. »




Pragmatisme
Le pragmatisme a toujours fait partie de la culture agricole et l’entrée du numérique dans les exploitations ne déroge pas à cette règle. Avec le transfert de génération, la concentration des exploitations, l’arrivée des nouvelles solutions et l’émergence de nouveaux enjeux (Politique démographique et environnementaux), l’agriculture cherche un nouveau visage, mais de façon pragmatique comme toujours.
Une grande majorité des interviewés (86%) nous expliquent l’idée suivante :
« Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si le numérique peut nous aider à améliorer la gestion de nos exploitations car nos en en sommes convaincus, mais avec QUELLES OFFRES, COMMENT et à quel PRIX ! Je veux des outils simples, modernes, intuitifs, intégrés. Je ne veux plus saisir plusieurs fois la même information tout en payant plusieurs licences ! Je voudrai d’ailleurs ne plus rien saisir du tout, éliminer le papier, les tâches inutiles ! Nous sommes au 21ème siècle ! Et je souhaite rester maître de mes données avec plus de transparence dans ce domaine. »
Conscience et lucidité
Les agriculteurs ont conscience des enjeux, des modèles économiques et des modalités de répartition de la valeur générée tout au long de la chaîne agricole. Les nouvelles générations en parlent ouvertement et de façon très lucide :
« Nous sommes passés d’un modèle de production industrialisé (mécanique, chimie…) d’après-guerre et tout cela soutenu par des pouvoirs publics préoccupés à éviter de nouvelles famines dans un contexte d’accroissement démographique et de manque de main d’œuvre rurale à un modèle de marché mondialisé intensif dans lequel nous n’avons pas su récupérer la part de la valeur créée nécessaire à notre rentabilité. Les transformations actuelles et les nouveaux outils numériques sont une chance de redistribution des cartes tant sur le plan technique qu’économique. A nous de bien choisir les nouveaux modèles et les nouvelles solutions. Nous avons appris du passé. »
« Nous devons profiter des transformations actuelles pour redistribuer les cartes. Les nouvelles solutions doivent être innovantes, performantes, pratiques, compétitives et nous permettre de rapatrier plus de valeur créée dans les exploitations. »
En conclusion
Cette enquête et les échanges de qualité avec nos interviewés, nous ont confirmé l’importance d’avoir des solutions qui, au-delà de fournir des outils de gestion simple, pratique, intuitif et bon marché, doivent également permettre aux exploitations de réinventer leurs modèles (techniques, économiques, organisationnels et commerciaux) aidés de leurs partenaires (conseillers, fournisseurs d’outils numériques …)





